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Henri Peña-Ruiz

1947

Né le 22 avril 1947 au Pré-Saint-Gervais (Seine), Il est élève à l'École Normale Supérieure de Saint-Cloud (ENS Lyon) où il obtient l'agrégation de philosophie. Dans les années 1970, il commence sa carrière d'enseignant au lycée de Sèvres et accède au statut de professeur de chaire supérieure au lycée Fénelon. Reconnu internationalement comme spécialiste du rapport entre religion et politique, et plus précisément de la laïcité, il a eu l'occasion d'intervenir comme expert dans diverses instances. Le 15 janvier 2002, il est nommé par arrêté du ministre de l'Éducation nationale comme membre du Comité national de réflexion et de propositions sur la laïcité à l'école. Il a également fait partie en 2003 des vingt « sages » de la commission sur la laïcité présidée par Bernard Stasi. En 2002, il soutient en Sorbonne une thèse de doctorat sous la direction de Bernard Bourgeois sur La Philosophie de la laïcité.


Pensée

Défendant les valeurs de solidarité et de justice sociale, il est devenu un spécialiste, entre autres, des questions de laïcité et de politique sociale. S'intéressant à l'expression sensible des idées et des concepts, il a écrit plusieurs livres sur les légendes de la pensée et conçu des émissions culturelles pour commenter les mythes fondateurs, comme ceux de Prométhée et d'Icare. Son objectif est d’émettre un éclairage laïque de l'ensemble de la culture, et notamment sur les « humanités ».


En ce qui concerne sa vision de la laïcité, il souligne que dans un monde où les nations reposent sur des populations marquées par une diversité croissante des origines culturelles, seul un cadre politique et juridique fondé sur des principes universels garantit l'intégration de tous. Cette universalité implique que les lois communes à tous soient affranchies des conceptions religieuses propres à certains. La séparation laïque de l'État et des Églises, de l'École et des églises, n'est nullement tournée contre les religions mais contre leurs privilèges publics, incompatibles avec l'égalité de droit des citoyens. Son ouvrage majeur sur ce sujet s'intitule Dieu et Marianne ; philosophie de la laïcité (Presses universitaires de France).


Les « options spirituelles »

Peña-Ruiz classe la croyance religieuse au rang des « options spirituelles », au même titre que l'agnosticisme et l'athéisme. Militant pour une égalité de traitement des convictions personnelles, il refuse tout privilège public accordé à la religion, de même que tout privilège public qui pourrait être accordé à l'athéisme. Le respect de la sphère privée des personnes implique que l'État s'abstienne de valoriser toute croyance particulière. Il s'oppose à l'instrumentalisation de la politique par la religion, ou de la religion par la politique. Il souligne la portée émancipatrice de la laïcité, notamment pour les femmes, mais aussi pour tous ceux qui entendent disposer d'eux-mêmes librement (promotion de la liberté de conscience). C'est dans cet esprit qu'il met en évidence la dimension universaliste de l'idéal laïque. Dans Dieu et Marianne, il développe une philosophie de la laïcité. Marianne, allégorie de la république, n'a pas à s'affirmer athée ou croyante, mais à s'interdire de privilégier une option spirituelle, sauf à discriminer certains citoyens par rapport à d'autres, ce qui offre le plus de liberté aux croyances religieuses comme aux humanistes athées et agnostiques, les traitant à égalité.


La laïcité n'a rien d'ambigu.

« La laïcité se définit très simplement par trois principes indissociables : la liberté de conscience – un croyant est libre de croire en Dieu, mais il n'engage que lui dans cette croyance ; un athée est libre de nier l'existence de Dieu et de n'affirmer qu'un humanisme athée, mais il n'engage que lui dans cette affirmation – l'égalité de droit sans distinction de conviction spirituelle et l'union des croyants divers, des athées et des agnostiques dans la participation à une sphère publique uniquement dévolue à l'intérêt général. Le bien commun, la res publica, nous permet de dépasser les communautarismes, de nous retrouver dans une sphère publique qui, dans sa neutralité et son indépendance par rapport à toute conviction particulière, permet de fonder la vie commune sur ces trois principes. À partir de là, la laïcité, c'est le principe qui unit tout le peuple (laos, en grec). Son étymologie renvoie à l'unité indivisible de la population, l'union du peuple, sans nier les différences, mais en invitant à considérer au contraire qu'en amont des différences, nous sommes tous des êtres humains, dotés de droits et de devoirs. Liberté, égalité, universalité de la puissance publique : voilà le triptyque qui définit la laïcité. », Henri Peña-Ruiz (Interview dans Le Point du 25/01/2016)


Une laïcité sans adjectif

Henri Peña-Ruiz dénonce la notion de « laïcité ouverte » ou « plurielle », proposée par certains penseurs, comme étant une contestation dissimulée des principes de la laïcité qui, par définition, est l'ouverture même aux différents registres de la liberté humaine mais aussi de l'égalité. En 2007, cette conception s'est développée contre le Discours du Latran dans lequel le président Nicolas Sarkozy développe le concept de « laïcité positive » qui lui semble de même nature que la laïcité « plurielle ». Quant au repli communautaire, il peut résulter quelquefois de la stigmatisation sociale, voire raciste ou xénophobe dont sont victimes les populations d'origine maghrébine. Pour lui, la justice sociale et les « dispositifs juridiques » (lois) sont des moyens complémentaires de défendre la laïcité.


Critique du pédagogisme

Dans Qu'est-ce que l’école ?, Henri Peña-Ruiz définit l'essence de l’école publique dans une perspective à la fois humaniste et républicaine, qui se veut fidèle aux Lumières. Il reprend ainsi la pensée de Gaston Bachelard : « C'est cette école que la science doit fonder. Alors les intérêts sociaux seront définitivement inversés : la Société sera faite pour l'École et non pas l'École pour la Société » (Cf. La formation de l'esprit scientifique).


Toujours dans Qu'est-ce que l’école ?, il s'en prend aux slogans mystificateurs et dévastateurs du pédagogisme, qu'il distingue de la pédagogie, comme placer l'élève au centre du système éducatif, ou encore l'impératif de transdisciplinarité. Le pédagogisme se présente comme progressiste, mais ignore la signification de l'Institution scolaire, comme des Savoirs, qui sont émancipateurs. Il est significatif que le pédagogisme ait fait de l'encyclopédisme une tare, oubliant l'œuvre de d'Alembert et Diderot. Le pédagogisme s'en prend à la conception transmissive des savoirs, mais il se représente lui-même le savoir, non comme une méthode, mais comme une chose, que l'on peut transmettre par une technique extérieure à la méthode propre d'un domaine donné, par exemple l'histoire. Il confond savoir et information, valeur interne du savoir et conditions psychologiques de l'apprentissage. Au fond, le pédagogisme est un transfert sur l'École du désir légitime de transformer la société. En décourageant les enseignants, le pédagogisme a beaucoup fait pour ruiner l'école et sa mission égalitaire et émancipatrice. Il contribue ainsi à enfermer chaque élève dans son milieu immédiat, au lieu de l'en libérer.


Bibliographie

La Laïcité, Flammarion, collection Dominos, 1998.

L'École, Flammarion, 1999.

Dieu et Marianne : philosophie de la laïcité, PUF, collection Fondements de la politique (1999 ; 2e édition revue et augmentée, 2005) ; Prix de l'instruction publique en 2000.

La Laïcité pour l'égalité, Fayard, Mille et une nuits, 2001.

Le Roman du monde, légendes philosophiques, Flammarion, Champs, 2001.

La Laïcité, GF, collection Corpus, 2003.

Qu'est-ce que la laïcité ?, Gallimard, collection Folio actuel, 2003.

Histoire de la laïcité. Genèse d’un idéal, Gallimard, collection Découvertes, 2005.

Qu'est-ce que l'école ?, Gallimard, collection Folio-Essais, 2005.

Dictionnaire amoureux de la laïcité, Paris, Plon, 2014.


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