Le mythe d'Icare - traité du désespoir et de la béatitude
André Comte-Sponville
1992
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PUF
Nous sommes prisonniers de l'avenir et de nos rêves : à force d'attendre des lendemains qui chantent, nous perdons la seule vie réelle, qui est d'aujourd'hui. « Ainsi nous ne vivons jamais, disait Pascal, nous espérons de vivre... » C'est le piège des religions, avec ou sans Dieu : l'espoir est l'opium du peuple. Pourtant il faut vivre et lutter : monter « à l'assaut du ciel», même si ce ciel n'existe pas. Tel est le défi aujourd'hui du matérialisme philosophique, tel qu'Icare a paru pouvoir le symboliser. Matérialisme ascendant, donc. Il s'agit d'être athée sans être indigne. Il nous faut pour cela inventer ― ou réinventer ― une sagesse sans mystification ni lâcheté : une sagesse du désespoir. Ici, maintenant : une sagesse pour notre temps. Le moi, la politique, l'art sont les trois domaines dont il a paru qu'il fallait d'abord se désillusionner. Ce premier tome s'y essaie. Nul salut dans le labyrinthe, et rien au-dehors. Le salut sera inespéré ou ne sera pas.